Il y a quelque temps, nous partagions sur Facebook la vidéo réalisée pour France Galop, montrant le magnifique centre d’entraînement rénové. Après l’annonce en novembre 2018 de la fermeture de l’hippodrome à l’issue de la saison 2019, France Galop avait présenté un plan de relance du centre d’entraînement afin de « rationaliser un site surdimensionné et stopper son déficit chronique ». Si la surface a diminué, la diversité des outils mis à disposition des entraîneurs demeure, dans le respect de l’histoire du centre d’entraînement.
La création du centre d’entraînement
Avant 1878, seules quelques initiatives personnelles permettent le développement de la pratique hippique à Maisons : l’organisation de trois réunions par Jacques Laffitte dans les avenues du Parc, la création par Charles Laffitte et son gendre le prince de la Moskowa de la Société d’encouragement pour l’amélioration des races de chevaux en France ou encore la construction dans les années 1850 d’un haras à proximité de la prairie des bords de Seine.
C’est à partir de 1878 que tout s’accélère. Le 6 juin 1878, est inauguré le premier champ de course sur la prairie des bords de Seine, où Joseph Oller obtient une concession pour y construire le tout premier hippodrome. Inauguré le 7 octobre, plus de 76 réunions y seront organisées en 4 ans. Puis les courses seront interrompues jusqu’en 1892 quand la société sportive d’encouragement rachète l’hippodrome, le champ de course, la ferme de Maisons et les terrains qui l’entourent pour un million de francs. Ce sont bien les prémices d’un centre d’entraînement tel que nous le connaissons aujourd’hui : il s’agit de pouvoir loger et entraîner à proximité du champ de course les purs-sangs.
Ce n’est cependant qu’un 1897-1898 que l’on peut considérer qu’un véritable centre d’entraînement est créé à Maisons-Laffitte. A cette date, douze entraîneurs de Maisons-Laffitte sollicitent l’ASP pour que les « routes d’entraînement dits ronds de sable ainsi que la ligne droite » soient à mises à leur disposition pour entraîner leurs chevaux. L’ASP répond favorablement et signe des baux de tolérance qui seront rapidement transformés en conventions individuelles.
En 1908, la société des steeple-chases de France prend en main l’organisation des courses à Maisons-Laffitte et signe, le 23 décembre 1910, une nouvelle convention avec l’ASP. Cette dernière lui assure l’utilisation de la piste Jacques Laffitte. Elle devient également propriétaire de plusieurs terrains dans le Parc afin d’y installer des pistes d’entraînement : les ronds Boileau, Poniatowski et Sainte-Hélène pour le plat et les ronds Eugène Adam et de l’Epine pour l’obstacle.
En 1913, le centre d’entraînement compte 1 300 chevaux de courses. Le Parc compte pour sa part 1 026 box répartis dans 51 écuries.
1914-1945 : le cheval de course à l’épreuve des guerres mondiales
Le 26 juillet 1914, la mobilisation générale débute : les hommes sont appelés sous les drapeaux et les chevaux sont réquisitionnés au titre de l’effort de guerre. Pendant la Première Guerre mondiale, les dirigeants hippiques craignent une trop longue interruption des courses pour leurs pur-sangs, et soulignent les conséquences désastreuses d’une suspension des courses qui compromet l’avenir de l’élevage français à un moment où il était parvenu à « rivaliser avec l’élevage anglais, le premier du monde depuis plusieurs siècles ». C’est ainsi que la Société d’Encouragement obtient, du ministre de l’agriculture, l’autorisation d’organiser quelques épreuves de sélection, sans public et sans pari, uniquement les jours de semaine. En 1917, huit réunions ont lieu sur l’hippodrome de Maisons-Laffitte puis 22 en 1918.
Le « retour à la normale » se fera le 5 mai 1919, à Maisons-Laffitte, ce qui souligne l’importance du site. Le centre d’entraînement, les 88 entraîneurs alors installés et leurs chevaux prospèrent mais la crise de 1929 aura un effet désastreux sur l’effectif des chevaux de course, et de selle !
Le 5 avril 1929, se crée à Maisons-Laffitte, l’Association générale des jockeys de France afin, notamment, d’obtenir une caisse de mutuelle couvrant les jockeys en cas d’accident ou de maladie, de créer une caisse de retraite ou encore de venir au secours de leur famille dans certains cas. Cette association aménagera au 45 avenue de Saint Germain l’hôpital des Jockeys, transféré ensuite au 19 bis avenue Eglé où il sera renommé l’hôpital des Courses.
Fait important, le 2 juillet 1932 est organisée sur l’hippodrome de Maisons-Laffitte la première course de « femmes-jockeys ».
Lorsque la seconde Guerre mondiale débute, les enseignements de la guerre précédente ont porté leurs fruits et le gouvernement de 1939 reconnait immédiatement l’importance économique de l’élevage qui ne peut vivre sans les courses, qui ne peuvent fonctionner sans public et sans pari mutuel. Cependant l’occupation de la région parisienne par les allemands force la délocalisation de nombre d’entraîneurs vers le sud de la France. Certains ayant choisi de rester à Maisons-Laffitte, les autorités allemandes décident d’assurer le ravitaillement des chevaux ainsi que de régler le salaire de lads et ouvriers de piste. Les courses reprendront sur l’hippodrome de Maisons le 21 mars 1941, mais sans pari. Pendant l’Occupation, 680 pur-sangs furent exportés en Allemagne et en Hongrie.
Paris est libéré le 25 août 1944 et la question se pose immédiatement de savoir ce que sont devenus les centres d’entraînement de Chantilly et Maisons-Laffitte. Dans les deux centres, les chevaux sont sains et saufs, l’hippodrome et les terrains d’entraînement sont en parfait état ce qui permet une reprise immédiate des courses.
L’après-guerre : sortir de la ville et se concentrer sur le Parc
En 1952, Maisons-Laffitte recense 2 100 chevaux de course dans son centre d’entraînement, ce qui représente les deux tiers des pur-sangs de la région parisienne.
En 1964, le centre d’entraînement engage un tournant important dans son histoire : 650 chevaux hébergés dans les écuries du centre-ville doivent être relogés car leurs écuries où ils logent sont menacées par de grands projets d’urbanisme et l’augmentation permanente de la circulation met en danger les chevaux. Il en est de même pour les 350 chevaux du « petit-parc », dont les écuries vont être détruites pour y construire des habitations.
A cette époque, le centre d’entraînement « côté Parc » compte 1 850 chevaux répartis sur une soixantaine d’écuries. Ils disposent de 50 hectares de terrain d’entraînement, 4 kilomètres de pistes de galop, un manège et 10 kilomètres de route de promenade. Le centre emploie 64 entraîneurs, 55 jockeys, 75 premiers garçons, 75 garçons de voyage, 306 lads et 335 apprentis auquel s’ajoutent les 154 employés de la société des steeple-chases (devenue France Galop). Aussi, entre 1962 et 1968, la Société acquiert 21 propriétés qui lui permettent de mettre 736 boxes à disposition des entraîneurs.
Parallèlement, la Société Sportive d’Encouragement, qui souhaite offrir aux turfistes des installations plus modernes, décide de reconstruire l’hippodrome (1970-1972). Ce dernier devient alors l’un des plus modernes d’Europe et peut se prévaloir d’être le seul, avec Newmarket, à disposer d’une ligne droite de 2 400 mètres. Malgré tous ces efforts, cette date marque la fin de la prééminence du centre d’entraînement de Maisons-Laffitte.
2019-2021 : le renouveau du centre d’entraînement
En moins d’un an, le centre d’entraînement est passé d’environ 70 hectares à 55 hectares. Une diminution qui passe par la disparition de plusieurs infrastructures (ronds d’entraînement, allées cavalières, obstacles, un manège, la piste Penthièvre…).
Après une première phase, commencée en septembre 2019, qui aura duré 6 mois, les travaux prennent fin en février en février 2020. Ces derniers auront servi à rénover la piste en sable fibré (PSF) ainsi qu’à refaire les obstacles sur la piste de Fromainville, à réaliser la réfection des pistes “noires” montantes et enfin à moderniser le rond Poniatowski. Une nouvelle phase de travaux consiste à refaire l’arrosage et mettre en place les clôtures sur la piste des “Lamballe” ainsi que le drainage de la piste “Noire” descendante.
Quelques chiffres permettent de résumer cette transformation :
- 12 employés de France Galop aujourd’hui (contre 42 auparavant)
- 55 ha au total (contre 70 ha environ)
- 5 km d’allées cavalières et de trotting (contre 15 km)
- 11 km de pistes en gazon (contre 22 km)
- 8 km de pistes en sable galop (contre 16 km)
- 57 obstacles (contre 110 obstacles)
- 2 manèges
- 1,5 km de piste en sable fibré (inchangé)
Les excellents résultats des entraîneurs, malgré le contexte compliqué de l’année 2020, portent à croire que le centre d’entraînement renaît et reprend une place majeure sur l’échiquier des courses hippiques.