Du Val Fleuri à la salle Malesherbes

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Pole culturel Malesherbes

Du grand parc du domaine de Maisons acheté à la maréchale Lannes en 1818, Jacques Laffitte fait, en 1834, deux parties : l’une qu’il vend par parcelles à des particuliers, l’autre – composée de boulevards, places, avenues et réserves boisées – restant sa propriété. Conjointement à cette opération, il s’engage le 15 février 1834, dans le cadre d’un Cahier des Charges, véritable charte du Parc, à céder 171 hectares de terrains à construire, chaque parcelle ne pouvant être inférieure à 1 700m². En dix ans, étonnement, seulement 18% des terrains seront vendus.

Nous allons ici vous raconter la passionnante histoire du lot à bâtir n° 38, parcelle de 19 104m², située entre les avenues Albine, Cuvier et Malesherbes. Passée entre de nombreuses mains, cette parcelle est divisée en 6 lots, dont l’une d’elles abrite la salle Malesherbes.

1846 – 1909 : le Val Fleury

C’est le neveu de Jacques Laffitte, Charles, qui achète la propriété à la famille Lebaudy (richissime famille française, ayant établi sa fortune grâce au raffinage du sucre) le 3 mai 1846. Charles Laffitte, né le 17 novembre 1804, sera député de l’Eure, conseiller municipal de Maisons et co-fondateur du Jockey-Club. Avec son oncle, il sera également l’un des fondateurs de la Compagnie des Chemins de fer de Paris-Rouen. Sa deuxième fille, Florence (1843-1901), épouse le Marquis Gaston de Gallifet (1831-1909), officier de cavalerie, « Massacreur de la Commune » puis Ministre de la Guerre dans le gouvernement Waldeck-Rousseau. Lorsque l’armée prussienne envahit et occupe Maisons entre septembre 1870 et février 1871, un détachement d’artillerie est envoyé sur la propriété du « Val Fleuri » de Charles Laffitte. Ils y incendient la bibliothèque, brisent les canapés et les fauteuils, brûlent les tapis et éventrent les tableaux. Sorti indemne de l’attaque, Charles Laffitte y décèdera néanmoins quelques années plus tard, le 20 décembre 1875.

Charles Laffitte (1803-1875)

Pendant 8 ans la propriété sera la propriété de la famille Sakakini, jusqu’au 11 mai 1883 lorsque l’actrice Jeanne Rey acquiert la propriété pour 200 000 francs. A peine quatre mois après l’acquisition, un terrible ouragan ravage la propriété. L’actrice la fait reconstruire au goût de l’époque, puis la lègue au baron Roger en 1894.

Le Baron Roger revend alors la propriété à Max Lebaudy, héritier de la famille Lebaudy qui avait acquis le lot n°38 en 1838. Né le 19 janvier 1873, Max Lebaudy a hérité à la mort de son père d’une fortune de 27 millions de francs or. Il sera essentiellement connu pour ses prodigalités, sa passion pour les chevaux de course et ses mondanités. Et pour cause ! En décembre 1894, 9 mois après l’acquisition du Val Fleuri, il entreprend d’organiser non pas une mais deux corridas pour ses amis ! Ainsi, il construit des tribunes, une arène en sable, fait venir chevaux, taureaux et toréadors. Le journal Temps raconte : « Max Lebaudie porte la tenue de ville des toréadors (…). Au pied de la tribune, un orchestre joue des airs de Carmen. Trompette enrubannée de rouge et jaune, toreros aux costumes brodés d’or, escarpins vernis, bas de soie de nuances tendre. (…) Deux courses sont prévues puis première mise à mort (…) : on dirait l’assassinat d’un héros maladroit par une bande de clowns. Enfin on l’achève au poignard… ».

Crédit photo : magazine de la Ville – octobre 2003

A sa mort, l’année suivante, on dénombre sur la propriété pas moins de 12 chevaux et 15 voitures ! Après une longue procédure notariale, la propriété est vendue par ses héritiers (sa mère, sa sœur et ses frères) à la société anonyme foncière et immobilière de France pour un million de francs le 9 août 1909.

1909 – 1922 : guerre ouverte entre l’ASP et la ville

Dès l’acquisition, la société foncière divise le terrain en trois lots : deux terrains « nus » et le terrain sur lequel se trouve la villa de Charles Laffitte. C’est à cette même époque que débute un bras de fer entre la ville de Maisons-Laffitte et le Parc, qualifié de « guerre » par le journal L’éclair. L’affaire est simple : exaspérée de prendre en charge l’enlèvement des ordures ménagères, dont la charge incombe en principe à la Ville, mais qui n’assure pourtant pas ce service, l’ASP dépose une demande de subvention : « Comme il (l’ASP) fait à ses frais beaucoup d’autres travaux analogues, dans le périmètre de sa propriété (…) il offrirait au Conseil Municipal de faire aussi l’enlèvement de ses ordures ménagères (…) avec 3 000 francs par an. » Le Conseil Municipal refusera purement et simplement, non sans avoir atermoyé pendant plus de deux ans !

Furieuse, l’ASP décida alors d’interdire à la Commune de tirer son feu d’artifice sur les pelouses du Parc. Plus de concert en plein air par la fanfare municipale sur les pelouses de l’avenue Albine, plus de complaisance comme ils en avaient pour la Commune. Et voilà la guerre déclarée… Ni une ni deux, les conseillers municipaux votent, au conseil suivant, l’achat pour 40 000 francs d’une propriété au sein du Parc (issu de la division du Val Fleuri) dans un seul et unique but : y tirer le feu d’artifice ! La Mairie acquiert donc le terrain de 4 417m² le 11 août 1910, ainsi qu’un terrain contigu de 65 m² sur lequel sera construit, l’année suivante, le kiosque à musique en bois rustique de forme octogonale.

Crédit photo : Magazine de la Ville – octobre 2003

En 1922, le Maire Duverdy, propose au conseil municipal d’agrandir le jardin municipal de l’avenue Albine affecté aux concerts, kermesse et réunions sportives. Les 2 720 m² restant à la société foncière sont alors cédés à la Ville.

1960 – 2003 : du kiosque municipal à la salle de spectacle

Le « kiosque municipal », comme l’appelait les mansonniens, accueille jusqu’au début des années 1970, les kermesses des Scouts de France, la remise des Prix ainsi que la kermesse des écoles. Mais en 1969, la fermeture de la Vieille Eglise contraint la municipalité à trouver un autre lieu pour accueillir les spectacles. Après 3 ans de travaux, la salle Malesherbes est inaugurée les 14 et 15 octobre 1972 avec un spectacle du Cercle artistique et de Variétés de Pierre Carpentier.

La salle Malesherbes en 2003

Des équipements techniques améliorent l’utilisation de la salle : création d’une pente afin d’améliorer la visibilité, nouveau plafond, création d’une régie-son et pose sur rail de projecteurs. Les sièges sont quant à eux remplacés en 2002 par des fauteuils en velours. En 2003, la Ville entreprend de nouveaux travaux de modernisation et de remise aux normes indispensables.

2020-2024 : création du pôle culturel Malesherbes

Projet très attendu à Maisons-Laffitte, les contours du futur pôle culturel Malesherbes se sont dessinés plus clairement l’été dernier. Retardé à juillet en raison de la crise sanitaire et du report des élections municipales, le budget 2020 est finalement voté le 10 juillet, incluant une enveloppe de 27.8M d’euros pour les « grands projets d’investissements ». Au premier rang de ces projets se trouve le futur centre culturel Malesherbes, un pôle culturel comprenant une nouvelle salle de spectacle et un conservatoire de musique qui prendront place en partie dans l’actuelle salle Malesherbes. L’effort financier pour ce projet, évalué à 12,4 M€, sera réparti entre 2020 et 2024.

Si le cabinet d’architectes a été désigné (l’agence Novembre Architectes) en février 2020, le début des travaux est lui prévu pour le début de l’année 2022. La nouvelle salle de spectacle, forte de ses 499 places, devrait ouvrir en septembre 2023.

Crédit photo : Johan Hugele
Crédit photo : Johan Hugele

Crédit photo : Johan Hugele

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